Le mariage entre tous – qui est le véritable non de la
réforme portée par la ministre Taubira – pose toute une série de problèmes qui
vont bien au-delà des conséquences immédiates pour les enfants. Toutefois,
faute d’avoir été clairement désignés, en allant à la racine des choses, le
débat précédent l’adoption du texte n’a pas eu lieu. On a assisté à des
invectives réciproques, lesquelles ont en partie masqué les incertitudes de
chacun vis-à-vis des questions en jeu : quelle place pour les personnes
qui ne vivent pas une vie de famille normale, quelle place et quelle mission
pour le couple homme-femme aimant, quel but pour cette vie mortelle ?
Comme témoin pendant les veillées, en lisant les
commentaires et les réactions publiées ou relayées par les médias aussi bien mainstream
qu’alternatifs c'est avec plaisir que je constate que les initiatives comme les
Veilleurs ou les Sentinelles suscitent l'intérêt, même négatif des
"partisans" de la loi Taubira. Cela signifie qu'un véritable échange
est possible. La démarche des Veilleurs – et des autres initiatives de réveil
des esprits – est donc pertinente. Leur silence, leur présence invitent et
presque obligent les passants, spectateurs, badauds ou opposants à rentrer en
eux-mêmes et à donner des arguments, ce qui conduit chacun, plus ou moins
rapidement à s’interroger sur ses propres motivations dans ce débat.
Je constate également que de part et d'autre nous sommes
encore dans l'invective et les simplifications et la première mission des
Veilleurs est donc bien d'ouvrir les participants aux veillées à la totalité du
réel, y compris la souffrance et les besoins réels des personnes dites
"homosexuelles". La loi Taubira ne pourrait pas exister sans un
problème réel et une souffrance profonde de la part de personnes de même sexe
vivant ensemble. D’une manière plus générale des termes comme ‘‘homophobes’’ ou
‘‘gayxtremisme’’ témoigne d’une ignorance et/ou d’un mépris des personnes
réelles qui doit cesser. Il ne faut pas confondre le problème et son
instrumentalisation par un lobby ou un groupe idéologique. A cet égard j’ai
noté la pertinence du fondateur des Veilleurs debout qui a relevé le risque non
négligeable de superficialité qui guette tout participant à une action d’éveil
de la conscience qu’elle soit le fait des ‘‘bons’’ comme les Veilleurs ou des ‘‘méchants’’
comme le Front de Gauche (inversez les rôles si vous vous sentez proche du ''Front de Gauche''). Devant la difficulté physique et la remise en cause
de notre propre confort personnel, surtout le confort de la pensée prémâchée,
la tentation est grande de fuir par le rêve, la musique sur les oreilles, la lecture de divertissement, le bavardage ou encore plus
simplement la répétition mécanique et impensée de slogans appris, comme le font
les perroquets.
Veiller sur le réel implique donc aussi de savoir
reconnaître et accepter ses propres limites, y compris en arrêtant de Veiller
debout ou assis. Si le premier résultat de notre veille n’est pas de nous
sensibiliser davantage au réel et à ses limites, nous faisons fausse route. C’est uniquement si nous sommes connectés au réel, enracinés
dans la vie, que nous pouvons saisir l’injustice du mariage entre tous et nous
engager dans une lutte efficace. Le problème de la loi Taubira et de ses
conséquences implicites (mères porteuses, enfants privés de leur père ou de
leur mère) vient de confusions et d'amalgames entre trois problèmes, utilisés
par les promoteurs de l'idéologie moderniste pour accélérer la décomposition de
la société occidentale.
1) La signification de l'homosexualité
2) Le rôle et la place des personnes ayant une attirance
pour les personnes de leur sexe
3) Les besoins spécifiques des personnes vivant en couple
non familiaux
Ce sont ces trois problèmes qui seront très rapidement
esquissés ici. Traiter de manière adéquate ces questions demandera encore des
années d’études et de recherches scientifiques, psychologiques et théologiques,
mais il faut donner un axe de travail et ceci est une première proposition.
1)
La signification de l'homosexualité
Il semble plus approprié de parler de
"ganymedisme" ou de "lesbianisme" pour rendre son aspect
concret, partiel et différencié à l’attirance d’un homme ou d’une femme pour
les personnes de même sexe. A cet égard un mot concret et descriptif, servant à
désigner ce type d’attirance affectivo-sexuelle stable serait le bienvenue pour
améliorer la qualité du débat de société.
Ce qui est donc appelé par facilité
"homosexualité" est un trouble de la personnalité (il est ressenti
comme tel par les intéressés) qui se caractérise principalement par un conflit
entre leur attirance affectivo-sexuelle et leur conformation physique. Ils se
savent faits pour s’accoupler avec les personnes du sexe opposé, mais
ressentent un désir pour celles de leur sexe. Les causes de ce troubles sont
mal identifiées et potentiellement nombreuses ; d'ordre aussi bien
physique (perturbation des hormones, gestation problématique, vaccins...) que
psychologique (traumatisme relationnel avec le parent du même sexe, initiation
sexuelle par un adulte du même sexe, pornographie homosexuelle pendant la
pré-puberté, conflits relationnels avec les jeunes du même âge...). Chaque
personne concernée aura une histoire et un vécu différent, mais toutes doivent
affronter un "syndrome" dans le sens où elles sont en conflit avec la
part "reproductive" de leur sexualité. C'est une blessure profonde
qui doit être reconnue et acceptée aussi bien par l'intéressé que par son
entourage. Nous assistons ici au même phénomène d’ignorance et de manque de
délicatesse qu’envers les personnes handicapés ou âgées. Faute d’être dans le
concret, le contact physique et le réel on aggrave trop souvent la souffrance
des intéressés en la camouflant ou en la niant.
Etre pour ou contre l’homosexualité, en réalité c’est passer
à côté du problème et cela peut aller, entre personnes ayant une attirance
homosexuelle, jusqu’à des actes homophobes, comme l’a montré Philippe Ariño
dans ses essais[1].
Ceux-ci prennent la forme d’une pratique ou d’un refus exacerbé de cette
attirance, faute de l’avoir comprise et accepté.
En effet ressentir n'est pas consentir et cette attirance,
même si elle est "anormale", au sens de hors de la norme de la
sexualité féconde, n'est pas en soi une faute. Le problème commence quand on
passe aux actes sexuels avec une personne de son sexe; les effets sont les
mêmes que pour les pratiques sexuelles "normales" ; on peut y trouver
du plaisir, devenir même dépendant, tout comme les personnes
"hétérosexuelles". Dans ce contexte précis d'addiction à la pratique
sexuelle il est juste de parler "d'homosexualité" et
"d'hétérosexualité" car dans les deux cas il s'agit d'une
polarisation de la personnalité autour d'un domaine de la vie, important, mais
pas essentiel, le sexe. Le vrai sens de l'attirance pour les personnes de son
sexe est en revanche celle d'une souffrance structurante qui permet de
comprendre, une fois assumée et intégrée, toute la valeur et la richesse de la
communion charnelle et spirituelle entre hommes et femmes. Ces personnes ont d'ailleurs
plus de facilité à créer des relations amicales fortes avec les personnes de
sexe opposées.
Il convient donc de distinguer soigneusement l’attirance
affectivo-sexuelle pour les personnes de son sexe, qui est une souffrance,
comme peuvent être le handicap ou la maladie, et qui intégrée et acceptée est
source d’une grande richesse intérieure et sociale d’une part, des actes
homosexuels d’autre part. Ceux-ci ne sont pas essentiels à la personne, au
contraire ils accentuent sa souffrance en aiguisant la conscience de
l’impossible fécondité à laquelle aspirent les actes sexuels qu’elle pose.
2) Le rôle et la place des personnes ayant une attirance
pour les personnes de leur sexe
Le rôle et la place des personnes attirées par celles de
leur sexe est donc de vivre au nom et pour le compte de nous tous la souffrance
qu'implique l'ambivalence présente dans toute relation humaines. Ce rôle
difficile et exigeant repose sur la blessure ouverte et saignante qu'est pour
elles le conflit constant entre attirance affective et réalité charnelle. Elles
voudraient s'unir aux personnes de leur sexe, mais leur corps ne permet pas la
communion féconde qui devrait couronner cette attirance. Deux options se
présentent alors : sublimer ce conflit pour leur propre bien et le nôtre ou
bien opter pour la satisfaction de ce penchant.
En contrepartie de cette blessure intime les personnes
attirées par celles de leur sexe ont une grande sensibilité qui les
prédisposent à exprimer et chanter l'expérience humaine à travers l'art, la
création, la pensée, la science, tout comme nombre d'autres minorités marquées
par la souffrance. Les plus grands artistes, scientifiques, penseurs ont
souvent eu des tendances homosexuelles fortes et nous devons les aimer et les
remercier pour ce service qui rend les hommes meilleurs et la vie plus douce à
vivre.
Les personnes attirées par celles de leur sexe nous
rappellent aussi la place relative et partielle de la vie familiale. Le couple
homme-femme aimant, même s’il est un modèle d’accomplissement merveilleux n’est
pas le tout de la vie humaine. D’autres domaines comme la vie de l’esprit ou de
la charité ont même une importance plus grande et plus essentielle. Sans les
arts ou la culture, la vie familiale serait sans idéal à vivre et à transmettre
et resterait frustre et incomplète.
Enfin les personnes dites ‘‘homosexuelles’’ ont beaucoup à
nous dire sur l’incomplétude de cette vie. Notre vie ici, même profondément
heureuse ne peut satisfaire totalement notre cœur, ce que les personnes attirés
par celles de leur sexe expérimentent tous les jours. Elles savent que le
paradis sur terre n’existe pas et leur aspiration à pouvoir donner leur cœur
autrement les rend capable de nous faire éprouver la nostalgie du ciel où toute
souffrance sera définitivement effacée. Et leur cœur à vif souffre d’autant
plus que les conditions matérielles de leur vie peuvent être difficiles.
3) Les besoins spécifiques des personnes vivant dans des couples non familiaux
Comme nous l’avons dit il y a un vrai problème, pas
spécifique aux personnes homosexuelles, de protection des couples
"non-familiaux" comme par exemple une veuve vivant avec son fils,
deux sœurs, un oncle et sa nièces, deux amis d'enfance. Ces "paires"
pour être plus exact mettent en commun leurs ressources affectives et
matérielles et rendent un grand service à la société en vivant une solidarité
concrète et simple. C'est cette solidarité qui doit être reconnue et soutenue,
indépendamment des questions de vie intime que la société n'a pas à connaître
car elles relèvent du cœur de chacun.
Par contre la reconnaissance sociale du couple
"homosexuel" elle n'est pas envisageable car elle est une injustice
faite au couple aimant homme-femme, le seul à même de transmettre la vie et qui
est institué dans ce but. Ce service de transmission de la vie inclut celui de
la culture et du patrimoine, ce qui autorise la formation de couples
"stériles" car insérés dans un
projet familial plus vaste d'une part et parce que d'autre part on ne peut
préjuger du résultat d'une union. La société demande donc juste que les
conditions de possibilité de transmission de la vie soient réunies. Pour le
reste il est sage de ne pas juger d’avance car la stérilité entre homme et
femme est d'ailleurs accidentelle, pas essentielle, comme le montre le cas un
peu exceptionnel d'Abraham et Sarah, parents d’Isaac à 99 et 90 ans. Le besoin
des couples non familiaux doit donc être envisagé sous l'angle de la solidarité
humaine et un simple contrat civil doit l'organiser.
Le problème est donc en fait l'intervention de l'état dans
les contrats privés et la confiscation du patrimoine des personnes qui ne sont
pas protégées par un contrat légal. En interdisant l'organisation spontanée de
la solidarité humaine par le biais de la confiscation fiscale du patrimoine
l'état a suscité l'apparition de mouvement de défense de l'égalité fiscale
entre citoyens, d'abord entre concubins "familiaux" pour la défense
de leur famille (conjoint survivant et enfants) et ensuite des personnes de
même sexe.
Il se trouve que certaines personnes de même sexe vivant
ensemble ont aussi des enfants. Le plus souvent ces enfants sont nés d’une
union familiale antérieure, auquel cas le droit des couples séparés s’applique,
sous le contrôle du juge, chargé de garantir l’équilibre financier et affectif
entre les anciennes parties. Dans un certain nombre de cas plus restreints ces
enfants sont nés de manipulations plus ou moins hasardeuses comme des dons de
spermes, des mères porteuses, des adoptions truquées. Il revient alors au juge
de rechercher le bien de l’enfant, au besoin en cassant des contrats civil
illégaux et en rendant l’enfant à ses parents ou en le confiant à une famille
aimante homme-femme. Là encore le juge doit appliquer le droit dans le respect
du réel, en évitant autant que faire se peut les postures idéologiques. Si la
moins mauvaise solution pour l’enfant est qu’il vive chez une paire de même
sexe, il conviendra de respecter ce fait.
De même une solution possible parmi d’autres, mais qui
permettrait de recréer une vraie solidarité de personne à personne, serait de
rendre la liberté d’usage de leurs biens aux citoyens. Renoncer à l’état
providence en contrepartie d’une reconnaissance fiscale des solidarités
concrètes. On pourrait par exemple diminuer le taux d’imposition sur l’héritage
et sur le revenu avec le nombre d’années passées ensemble ou le nombre de mois
consacrés à aider un partenaire. Dans le même ordre d’idée on pourrait
supprimer la progressivité de l’impôt en contrepartie d’une forte valorisation
sociale des dons et des actions de solidarité. Dans un autre genre on pourrait
rendre la liberté des contrats immobilier afin que chacun puisse avoir le
contrat qui lui convienne : à plusieurs titulaires, avec transmission
automatique du bail, avec usage au partenaire survivant… Cela permettrait de
régler les situations au cas par cas en sortant de cette passion française pour
les cases à cocher. ‘‘Ça dépend, ça dépasse’’ ce n’est pas qu’une réplique
célèbre[2],
c’est trop souvent le dilemme dans lequel se trouvent pris trop de personnes
‘‘hors normes’’.
En conclusion la vraie cause des problèmes créés par la loi
Taubira est donc la prétention de l'état à régenter la vie privée des personnes
en déterminant qui peut être avantagé fiscalement et qui non. Il s'agit là d'un
des aspects de l'idéologie moderniste qui prétend que l'humanité ne doit pas se
recevoir ni se reconnaître créature et partie d'un projet global, mais s'auto-créer
et définir elle-même ce qu'est le réel. Dans ce cadre la famille traditionnelle
est un ennemi car elle existe "naturellement" de façon spontanée et
antérieure à toute organisation publique. Elle est donc un adversaire de cette
idéologie qui pour cette raison cherche à l'éliminer. Dans ce combat le
problème fiscal des paires "non familiales" a été instrumentalisé
dans ce sens. En choisissant de les faire rentrer de force dans un modèle qui
ne leur convient pas – le mariage – les tenants de cette idéologie voulaient
détruire le modèle.
La question est là, accepterons-nous d'en débattre ? Ou bien
resterons-nous à la surface des choses ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire